Philosophie

14 août 2002 : je débarque sur la plage du camping de Turku, sur la côte Ouest de Finlande, avec quatre compagnons d'aventure. S'achèvent ici 14 jours de kayak de mer entre les milliers d'îles, pour la plupart désertes, qui peuplent la mer Baltique entre Suède et Finlande. Outre le plaisir de l'aventure réalisée, il me reste un parfum d'amertume : c'est la fin du voyage et j'ai une forte envie de continuer en remontant le long des côtes finlandaises pour poursuivre cette vie simple au plus près de la nature. Mais même les plus beaux rêves ont une fin...

Après une longue expérience de la randonnée autonome en kayak de mer, j'ai découvert que le voyage à vélo couché en est l'équivalent sur terre. Il permet de voyager loin et longtemps sans fatigue. Exit les douleurs au cou, aux fesses, aux poignets qui vous font arrêter au bout d'une quarantaine de kilomètres en vélo droit. Après 100 km en vélo couché, on peut continuer pour encore autant. Le tricycle permet en plus de ne pas avoir à gérer l'équilibre et de se consacrer davantage aux paysages traversés.

La philosophie du voyage c'est la liberté et l'indépendance, mais aussi l'asservissement aux éléments naturels et la gestion nécessaire d'un certain risque en prenant des marges de sécurité. Voyager ne veut pas dire improvisation face aux difficultés, ou inconscience devant le danger, bien au contraire. Mais anticipation, préparation, acceptation de ses limites, et connaissance d'un milieu, afin de savourer des moments privilégiés. Le confort, l'effort continu, l'engagement, les rencontres imprévues, la vie proche de la nature sont des éléments d'enrichissement quotidiens. La vitesse en vélo ou en kayak de mer est suffisamment lente pour permettre de profiter pleinement des paysages et des instants fugitifs offerts par la présence inopinée de la faune.

Et notre belle planète regorge d'endroits extraordinaires qui méritent qu'on y passe en se fondant dans le paysage et où la rencontre des autochtones ouvre les voies d'un enrichissement culturel. Les gens croisés sur la route nous font partager leur culture. Et ces instants restent gravés dans nos mémoires. C'est aussi se découvrir soi-même en se plaçant dans des circonstances et des lieux inhabituels qui vont engendrer un comportement lui aussi inhabituel. Quand on part, on voyage pour soi, on est en vacances. L'objectif d'un voyage est avant tout de se faire plaisir. C'est découvrir, voir, sentir, toucher, entendre sans l'intermédiaire du filtre des autres. Le voyage nous rend un peu plus humain et un peu moins méfiant. L'aventure est un état d'esprit, une envie d'aller à la rencontre d'expériences nouvelles et de s'adapter aux imprévus, forcément au rendez-vous. Il n'y a pas d'exploit, c'est à la portée de tous. L'aventure commence dès que vous passez votre porte. Même si on associe souvent le terme à des destinations lointaines et engagées, on oublie souvent que l'aventure peut se trouver tout près de chez soi. Il est surprenant qu'on connaisse souvent moins bien la région où l'on habite que celles où on est allé passer des vacances. En fait, l'aventure c'est d'abord changer son mode de vie, se réadapter, retrouver ses racines de nomade et ne pas rester plus de 3 jours au même endroit.